vendredi 3 février 2012

L'enfer de la route 40 – Deuxième partie

Revigoré par un superbe lever de soleil, je termine la ligne droite de 70 kilomètres entamée la veille, avant de retrouver avec joie un virage et l’asphalte. Sur ma carte, un village est indiqué à une trentaine de kilomètres de là. J'espère y trouver de quoi me ravitailler car j'ai épuisé mes vivres. Mais arrivé sur place, je ne trouve qu'une seule maison, celle de l'intendant régional de la Direction des Routes. Il m'indique qu'il n'y a aucun village sur la route avant 300 kilomètres. La seule solution pour trouver de la nourriture est de quitter la Route 40 pour gagner la bourgade de Gobernador Gregores. Cela représente un détour de 70 kilomètres mais je n'ai pas le choix. J'embarque 10 litres d'eau et me mets en route. La route menant à Gobernador Gregores est également en travaux. Une grande partie est déjà asphaltée mais n'est pas encore ouverte à la circulation. Un responsable des travaux m'invite cependant à l'emprunter. Malgré le vent - toujours défavorable -, le trajet est agréable car je retrouve un paysage vallonné rompant la monotonie de la pampa plane.


J'arrive à Gobernador en fin d'après-midi et me pose dans un hospedaje afin de fuir provisoirement le vent. Car ce vent, qui ne s'arrête jamais, rend fou. Non seulement il m'est défavorable la plupart du temps lorsque je suis sur le vélo, mais il m'empêche aussi de monter ma tente et nécessite une attention de tous les instants. Un gant ou un paquet de biscuit posé par terre et c'est fini, le vent l'emporte immédiatement.

Depuis Gobernador, des bus partent pour El Chalten. Je me donne la soirée pour réflechir : prendre un bus ou poursuivre ce défi. Après un bon repas et une nuit de repos, je choisis finalement de continuer en vélo. Je suis à moins de 180 kilomètres du village de Tres Lagos - où la route redevient asphaltée - que je devrais pouvoir atteindre en deux jours. Je fais le plein de provision et me mets en route pour regagner la Route 40 par le Sud.

Assez vite, je regrette ma décision car la piste est extrêmement mauvaise. Une voix me dit de faire machine arrière mais je ne l'écoute pas. Je continue sur cette piste très difficile avec un vent de face de plus en plus puissant. Je suis de nouveau complètement seul. Pas un signe de vie, pas une voiture de la journée. Je me demande alors pourquoi je m'inflige cela. Car, j'ai beau chercher, je ne trouve aucun plaisir à lutter ainsi contre les éléments, hormis peut-être le dépassement de soi. Heureusement, j'ai le ciel avec moi puisqu'un soleil éclatant m'accompagne globalement depuis mon départ de Perito Moreno. Après soixante kilomètres de lutte, je retrouve la Route 40 où j'espère trouver une piste en meilleur état. Hélas, ça n'est pas le cas, bien au contraire. Je ne trouve que du sable profond recouvert de grosses caillasses et toujours ce vent de Patagonie.



Aux termes de deux heures d'effort durant lesquelles je parcours une ligne droite et plate de dix kilomètres, je découvre, à la faveur d'une descente, un panorama somptueux donnant sur le Lago Cardel. Ce paysage, magnifié par le coucher de soleil, justifie à lui seul les énormes efforts consentis toute la journée. Cerise sur le gâteau, en bas de la descente, je trouve un bel endroit bien abrité me permettant de monter de ma tente et de passer une belle soirée.



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